Rendez-vous est donc pris, un soir à Bruxelles, avec ces mystérieux colleurs d’affiches. Cinq personnes. Deux voitures. 200 affiches. Assez pour tenir toute la nuit.
Chaque député pour l’euthanasie y passe
Les cinq amis ont tout prévu: un rouleau de tapisserie avec un manche de 6 mètres de long, mais aussi des affiches « Il a voté pour l’Euthanasie des enfants » dans les deux langues. Et pour ne pas faire de sexisme, il y a aussi des affiches au féminin. Sur chaque affiche, un pouce renversé, symbolisant la réprobation. Une action trop violente? Chacun jugera, mais nous rappellerons qu’il est illégal de s’en prendre à une affiche électorale. Rappelons aussi qu’il est interdit de coller entre 22h et 6h du matin.
A la base de cette initiative: Julien et Christophe. Les deux hommes ne se connaissaient pas avant, mais ont réuni quelques connaissances pour que la question de l’euthanasie des enfants malades soit discutée par les électeurs. A 26 ans, Julien n’hésite pas à passer ses soirées à son travail d’affichage: « Ces députés pensent qu’on s’en fiche, mais nous les citoyens, on ne s’en fiche pas du tout ».
Pour Christophe, père de famille issu du monde de l’entreprise, la question est surtout démocratique. « Ce vote s’est fait sans transparence: nous voulons montrer qui a voté pour quoi ».
Leur technique est bien rôdée: d’abord vérifier quel candidat a voté la loi sur l’euthanasie des enfants, étaler la colle, apposer l’affiche, puis éliminer soigneusement les plis et bulles d’air. Aucun esprit partisan: tous les politiciens ayant voté pour l’euthanasie y passent, peu importe le parti. PS ou N-VA, MR ou Groen, chacun a droit à son affiche, dans sa langue.
Analyse: qui a peur d’afficher son vote?
Mais ces affichages sauvages ont-ils vraiment un impact?
On peut aisément se douter que leurs affiches seront très vite recouvertes par de nouvelles affiches des candidats, cela s’appelle le surcollage. A quoi aura alors servi leur travail?
Ce n’est sûrement pas le PS qui a le plus à perdre de ce petit jeu: les députés socialistes assument sans honte leur engagement en faveur de l’euthanasie des enfants malades. Mais dans les partis de droite comme la N-VA ou le MR, les électeurs pourraient se souvenir du vote de certains candidats. En Flandre, les électeurs chrétiens hésitant entre la N-VA et le CD&V pourraient finalement se décider à sanctionner les nationalistes pour avoir largement voté en faveur de l’euthanasie. A l’inverse, le cdH et le CD&V pourraient récolter les bénéfices de leur engagement contre cette loi.
Mais quoi qu’il en soit, les cinq activistes savent bien que leur travail n’influencera pas le cours de la campagne. Ils veulent plutôt montrer qu’ils restent déterminés à éviter que ce sujet tombe dans l’oubli et donc la banalisation.
Débutée à 23h à Bruxelles, la folle randonnée ne se terminera qu’à deux heures du matin dans le Brabant wallon! A cette heure-là, Christophe conclut la soirée: « Il faut rentrer sinon on va se faire engueuler par nos femmes! »
M.B.
Source et photos: Médias Catholiques Belges Francophones (mcbf.be)