Vous vous engagez aujourd’hui pour défendre les soins palliatifs. Pourquoi ?
Quand j’ai tourné « Ma compagne de nuit », en 2010, je jouais une femme atteinte d’un cancer en phase terminale. Je désirais comprendre comment on vit quand on est atteint d’une maladie grave et que l’on souhaite rester à domicile pour y vivre ces dernières semaines. J’ai alors rencontré des personnes formidables, médecins et accompagnants en soins palliatifs qui m’ont conseillée pour le tournage. Notamment Françoise Ellien, qui a mis en place le réseau Spes dans l’Essonne pour développer les soins palliatifs à domicile. Elle m’a aidée tout au long du film. J’ai aussi passé du temps dans l’unité de soins palliatifs du Dr Sylvain Pourchet à Villejuif. On ne parle pas assez du travail extraordinaire de ces équipes qui accompagnent jusqu’au bout de la vie. A mon tour, j’ai eu envie de les aider à faire connaître la démarche des soins palliatifs. C’est un combat qui a du sens et qu’en tant que citoyenne, j’ai envie de soutenir.
Qu’avez-vous découvert aux côtés de ces soignants ?
D’abord un univers que je ne connaissais pas. Ils se battent tous les jours pour essayer de changer la vie des autres, et surtout la fin de leur vie. A l’occasion de ces rencontres, j’ai aussi appris que la demande des malades peut évoluer. Certains n’en peuvent plus, ils réclament qu’on les aide à mourir. Mais lorsqu’on leur propose de les accompagner, lorsqu’on prend en charge leur douleur physique et leur souffrance psychologique, lorsqu’on accompagne leur famille, car pour elle aussi le voyage est très dur, la demande de mort cesse souvent.
Pourquoi parle-t-on autant d’euthanasie en France, et peu des soins palliatifs qui restent mal connus du grand public?
En France, on débat beaucoup en effet de l’euthanasie et du suicide assisté, justement parce qu’on ne parle pas assez de soins palliatifs. Comment aider celui qui part à rester en vie jusqu’au bout ? Peut-être en essayant de trouver avec lui un autre sens à la vie, de goûter d’autres formes de plaisir ? Un rayon de soleil, un verre de vin, un simple regard deviennent importants. Ou bien une ultime rencontre pour se réconcilier avec quelqu’un qu’on aime… Moi, cette question-là m’intéresse plus que l’euthanasie. Elle m’en éloigne un peu. Mon regard a changé sur la fin de vie.
Vous avez accompagné votre grand-mère qui vivait avec vous. Avez-vous pu vivre ces moments comme vous le souhaitiez ?
J’ai pu accompagner ma grand-mère jusqu’à sa mort et j’ai vu l’importance des soins palliatifs à domicile. Ces moments ont changé quelque chose en moi de très profond. Je ne suis plus la même. J’ai constaté aussi les défaillances du système, le manque de coordination entre la médecine de ville et l’hôpital, le manque de moyens. On se retrouve parfois très seul. J’ai trouvé la force de continuer grâce à Françoise Ellien et au Dr Pourchet, les soignants rencontrés sur le tournage du film. Je voudrais que tout le monde ait la chance d’être aidé comme je l’ai été. C’est pour cela qu’il faut continuer à développer les réseaux de soins palliatifs.
(*) Article publié dans La Vie du 10 octobre 2011
Source: Sauvons Papi et Mami, il y a urgence