Nota: les passages en gras, soulignés ou en italique sont dans le texte original du Cardinal Sarah.
Regardons autour de nous ! La société occidentale a choisi de s’organiser sans Dieu. La voilà maintenant livrée aux lumières clinquantes et trompeuses de la société de consommation, du profit à tout prix, de l’individualisme forcené.
Un monde sans Dieu est un monde de ténèbres, de mensonge et d’égoïsme !
Sans la lumière de Dieu, la société occidentale est devenue comme un bateau ivre dans la nuit ! Elle n’a plus assez d’amour pour accueillir des enfants, les protéger dès le sein de leur mère, les préserver de l’agression de la pornographie.
Privée de la lumière de Dieu, la société occidentale ne sait plus respecter ses vieillards, accompagner vers la mort ses malades, faire une place aux plus pauvres et aux plus faibles. Elle est livrée aux ténèbres de la peur, de la tristesse et de l’isolement. Elle n’a plus que le vide et le néant à offrir. Elle laisse proliférer les idéologies les plus folles. Une société occidentale sans Dieu peut devenir le berceau d’un terrorisme éthique et moral plus virulent et plus destructeur que le terrorisme des Islamistes. Souvenez-vous que Jésus nous a dit : « Ne craignez rien de ceux qui tuent le corps, mais ne peuvent tuer l’âme ; craignez plutôt Celui qui peut perdre dans la géhenne à la fois l’âme et le corps » (Mt 10, 28).
Chers amis, pardonnez-moi cette description. Mais il faut être lucide et réaliste.
Si je vous parle ainsi, c’est parce que, dans mon cœur de prêtre, de pasteur, je ressens de la compassion pour tant d’âmes égarées, perdues, tristes, inquiètes et seules !
Qui les conduira à la lumière ?
Qui leur montrera le chemin de la vérité, le seul vrai chemin de liberté qui est celui de la Croix ?
Va-t-on les livrer à l’erreur, au nihilisme désespéré, ou à l’islamisme agressif sans rien faire ?
Nous devons clamer au monde que notre espérance a un nom : Jésus Christ, l’unique Sauveur du monde et de l’humanité !
Nous ne pouvons plus nous taire !
Votre premier témoignage doit être votre propre exemple : agissez selon la Vérité ! Dans votre famille, votre profession, vos relations sociales, économiques, politiques, que le Christ soit votre Lumière ! N’ayez pas peur de témoigner que votre joie vient du Christ !
Je vous en prie, ne cachez pas la source de votre espérance ! Au contraire, proclamez ! Témoignez ! Évangélisez ! L’Église a besoin de vous ! Rappelez à tous que seul « le Christ crucifié révèle le sens authentique de la liberté ! »(1) . Avec le Christ, libérez la liberté aujourd’hui enchaînée par des faux droits humains, tous orientés vers l’autodestruction de l’homme.
A vous, chers parents, je veux adresser un message tout particulier. Être père et mère de famille dans le monde d’aujourd’hui est une aventure pleine de souffrances, d’obstacles et de soucis. L’Église vous dit : « Merci » ! Oui, Merci pour le don généreux de vous-mêmes !
Ayez le courage d’élever vos enfants à la lumière du Christ. Il vous faudra parfois lutter contre le vent dominant, supporter les moqueries et les mépris du monde. Mais nous ne sommes pas ici pour plaire au monde ! « Nous proclamons un Christ crucifié, scandale pour les juifs et folie pour les païens » (1 Co 1, 23-24)
N’ayez pas peur ! Ne renoncez pas ! L’Église, par la voix des Papes - tout spécialement depuis l’encyclique Humanae Vitae - vous confie une mission prophétique : témoigner devant tous de notre confiance joyeuse en Dieu, qui nous a fait gardiens intelligents de l'ordre naturel. Vous annoncez ce que Jésus nous a révélé par sa vie même : « La liberté s'accomplit dans l'amour, c'est à dire le don de soi »(2) .
Chers Pères et Mères de famille, l’Église vous aime ! Aimez l’Église ! Elle est votre Mère. Ne vous joignez pas à ceux qui se moquent d’elle, parce qu’ils ne voient que les rides de son visage vieilli par les siècles de souffrance et d’épreuves. Aujourd’hui encore, elle est belle et rayonne de sainteté.
Toutefois, je vous prie d’écouter d’abord un « Ancien », qui a plus d’autorité que moi. Il s’agit de l’évangéliste saint Jean. Au-delà de l’exemple de sa vie, saint Jean a également laissé un message écrit aux jeunes. Dans sa Première Lettre, nous lisons ces paroles émouvantes d’un Ancien aux jeunes des Eglises qu’il avait fondées. Ecoutez sa voix pleine de vigueur, de sagesse et de chaleur : « Je vous l’ai écrit, à vous, les plus jeunes : vous êtes forts, la Parole de Dieu demeure en vous, vous avez vaincu le Mauvais. N’aimez pas le monde, ni ce qui est dans le monde » (1 Jn 2, 14-15) (3).
Le monde que nous ne devons pas aimer, commentait le Père Raniero Cantalamessa, dans son homélie du Vendredi Saint 2018, et auquel nous ne devons pas nous conformer, n’est pas, nous le savons bien, le monde créé et aimé par Dieu, ce ne sont pas les personnes du monde vers lesquelles, au contraire, nous devons toujours aller, surtout les pauvres et les derniers des pauvres, pour les aimer et les servir humblement… Non ! Le monde à ne pas aimer est un autre monde ; c’est le monde tel qu’il est devenu sous la domination de Satan et du péché. Le monde des idéologies qui nient la nature humaine et détruisent la famille… Les structures onusiennes, qui imposent une nouvelle éthique mondiale, jouent un rôle décisif et sont devenues aujourd’hui une puissance écrasante, qui se propage par la voie des ondes à travers les possibilités illimitées de la technologie. Dans beaucoup de pays occidentaux, c’est un crime aujourd’hui de refuser de se soumettre à ces horribles idéologies. C’est ce que nous appelons l’adaptation à l’esprit du temps, le conformisme. Un grand poète croyant britannique, du siècle dernier, Thomas Stearns Eliot a écrit trois versets qui en disent davantage que des livres entiers : « Dans un monde de fugitifs, celui qui prend la direction opposée aura l’air d’un déserteur ». Chers jeunes chrétiens, s’il est permis à un « Ancien », comme l’était saint Jean, de s’adresser directement à vous, je vous exhorte moi aussi, et je vous dis : vous avez vaincu le Mauvais ! Combattez toute loi contre nature, que l’on voudrait vous imposer, opposez-vous à toute loi contre la vie, contre la famille. Soyez de ceux qui prennent la direction opposée ! Osez aller à contre-courant ! Pour nous, chrétiens, la direction opposée n’est pas un lieu, c’est une Personne, c’est Jésus Christ, notre Ami et notre Rédempteur. Une tâche vous est particulièrement confiée : sauver l’amour humain de la dérive tragique dans laquelle il est tombé : l’amour, qui n’est plus le don de soi-même, mais seulement la possession de l’autre - une possession souvent violente tyrannique -. Sur la Croix, Dieu s’est révélé comme « agape », c’est-à-dire comme l’amour qui se donne jusqu’à la mort (4). Aimer vraiment, c’est mourir pour l’autre. Comme ce jeune gendarme, le colonel Arnaud Beltrame !
Chers jeunes, vous éprouvez souvent sans doute, dans votre âme, la lutte des ténèbres et de la lumière. Vous êtes parfois séduits par les plaisirs faciles du monde.
De tout mon cœur de prêtre, je vous le dis : n’hésitez pas !
Jésus vous donnera tout ! En le suivant pour être des Saints, vous ne perdrez rien ! Vous gagnerez la seule Joie qui ne déçoit jamais !
Chers jeunes, si, aujourd’hui, le Christ vous appelle à le suivre comme prêtre, comme religieux ou religieuse, n’hésitez pas ! Dites lui : « fiat » , un oui enthousiaste et sans condition !
Dieu veut avoir besoin de vous, quelle grâce ! Quelle joie !
L'Occident a été évangélisé par les Saints et les Martyrs. Vous, jeunes d'aujourd'hui, vous serez les saints et les martyrs que les nations attendent pour une Nouvelle Evangélisation ! Vos patries ont soif du Christ ! Ne les décevez pas ! L’Église vous fait confiance !
Je prie pour que nombreux parmi vous répondent, aujourd’hui, durant cette Messe, à l’appel de Dieu à le suivre, à tout laisser pour lui, pour sa lumière.
Chers jeunes n’ayez pas peur, Dieu est le seul ami qui ne vous décevra jamais !
Quand Dieu appelle, il est radical. Cela signifie qu’Il va jusqu’au bout, jusqu’à la racine. Chers amis, nous ne sommes pas appelés à être des chrétiens médiocres ! Non, Dieu nous appelle tout entier jusqu'au don total, jusqu'au martyr du corps ou du cœur !
Cher peuple de France, ce sont les monastères qui ont fait la civilisation de ton pays ! Ce sont les hommes et les femmes qui ont accepté de suivre Jésus jusqu’au bout, radicalement, qui ont construit l’Europe chrétienne. Parce qu’ils ont cherché Dieu seul, ils ont construit une civilisation belle et paisible, comme cette cathédrale.
Peuple de France, peuples d’Occident, vous ne trouverez la paix et la joie qu’en cherchant Dieu seul ! Retournez à vos racines ! Retournez à la Source ! Retournez aux monastères ! Oui, vous tous, osez aller passer quelques jours dans un monastère ! Dans ce monde de tumulte, de laideur et de tristesse, les monastères sont des oasis de beauté et de joie. Vous y ferez l'expérience qu'il est possible de mettre concrètement Dieu au centre de toute sa vie. Vous y ferez l'expérience de la seule joie qui ne passe pas !
Chers pèlerins, renonçons aux ténèbres. Choisissons la lumière ! Demandons à la Très Sainte Vierge Marie de savoir dire « fiat », c’est-à-dire oui, pleinement, comme elle, de savoir accueillir la lumière de l'Esprit Saint comme elle. En ce jour où, grâce à la sollicitude du Saint-Père le Pape François, nous fêtons Marie, Mère de l’Église, demandons à cette Mère Très Sainte d'avoir un cœur comme le sien, un cœur qui ne refuse rien à Dieu, un cœur brûlant d'amour pour la gloire de Dieu, un cœur ardent à annoncer aux hommes la Bonne Nouvelle, un cœur généreux, un cœur large comme le cœur de Marie, aux dimensions de l’Église, aux dimensions du Cœur de Jésus !
Ainsi soit-il !
Robert Card. Sarah
Lire l'entièreté de l'homélie sur le site de Notre-Dame de Chrétienté