"Sois vrai" : Sois vrai et fais ce que tu dis… le moins qu’on puisse dire, c’est que ce n’est pas très sexy comme devise. De nos jours, on dirait plutôt :
« Sois libre, et fais ce que tu veux ».
Dans les films, les mythes d’aujourd’hui, il y a les héros qui qui combattent pour le bien contre le mal (le Seigneur des anneaux, Harry Potter, Thomas More, etc…), mais de plus en plus souvent, le héros meurt pour la liberté contre l’oppression (vous vous souvenez sans doute de films comme Braveheart, Gladiator, etc…).
De fait, de nos jours, nous sommes des grands libéraux, des fans de la liberté. Nous voulons, comme en mai 68 jouir sans entrave (« il est interdit d’interdire, Même si Dieu existait, il faudrait le supprimer » disaient encore les slogans de l’époque). Tout concept de bien ou de vrai est vu comme un obstacle à l’épanouissement personnel. Etre vrai, l’idée même du concept de Vérité, ce n’est pas très populaire.
On ne parle plus de la Vérité mais d’une vérité (sous-entendu qu’il en y a plusieurs, ce qui est une autre manière de dire qu’il n’y en a aucune), on ne parle plus de bien et de mal, mais de « valeurs » et on quand on dit « être vrai » on veut dire « être sincère ».
Il est clair que quand on dit « sois vrai », on sous-entend aussi « sois sincère », mais cela va beaucoup plus loin que cela. C’est un thème tout à fait fondamental. En disant d’abord « sois vrai », cela veut dire que c’est la Vérité, ce qui est vrai, beau et bien qui est le critère le plus déterminant de ce que nous devons faire.
Vous en êtes d’ailleurs aujourd’hui un bon exemple parce que vous êtes chef, et vous êtes chef pas uniquement parce que vous vous amusez, parce que c’est cool, parce que c’est « in », mais aussi et surtout parce que vous êtes convaincus de réaliser quelque chose de bien, d’apporter quelque chose de positif à vos garçons, de les faire grandir dans ce qui est vrai. Ce que vous avez fait de bien vous apporte une satisfaction de vous-même, un souvenir profond et durable de vos années scoutes.
Le vrai, c’est ce qui est juste, bon et beau. C’est ce qui doit être déterminé et juger nos actes. De nos jours, on a tendance à dire que c’est la liberté ou à défaut celle du plus grand nombre, qui détermine ce qui est bien. Mais cela ouvre en fait la porte à toutes les dérives, car si le « bien » et le « mal » deviennent ce qui nous arrange bien, ces notions n’ont plus le moindre intérêt.
Sans rentrer dans les détails, nous croyons que la Vérité existe :
- Qu'elle peut être connue, et absolue
- Donc supérieure à toute autre forme de critère d'actions (y compris la démocratie par exemple)
- Les "valeurs chrétiennes" ne sont donc pas seulement des "valeurs" (comme dirait Nietzsche), mais "le Bien".
- Que la négation de la Vérité mène in fine à la perte de liberté et au totalitarisme (BXVI :
•Thème de la Vérité comme critère de discernement :
- Connaître la Vérité nous évite de nous tromper et d'agir suivant ce qui est bon
- Connaître la Vérité nous évite d'être trompés (par les autres, par nos émotions, par ce qui est bon en apparence).
- Ex : Nous sommes souvent manipulés émotivement par les médias pour influencer nos actes, sans réflexion sur leur véracité.
- C'est la Vérité qui nous amène à la Liberté et non l'inverse.
- La vérité précède l'Agir et non l'inverse (=existentialisme ?)
"et fais ce que tu dis" : Après toute cette philosophie, ça vous fait une belle jambe si ça ne donne rien de concret. Si la Vérité doit déterminer nos actes, c'est sur ceux-ci que nous sommes jugés. Etre vrai, en soi, ne suffit pas.
Nous ne sommes pas un genre de protestants qui penseraient que seule la foi compte. St Jacques dit : la foi sans les actes = lettre morte.
Ici rentre en compte ce qu’on appelle « l’unité de vie ». (grand thème à la route). L’unité de vie, c’est l’unité entre dire, penser et faire (pense ce que tu fais, fais ce que tu dis, dis ce que tu penses, etc…)
Une des manières d’expliquer ce qu’est une chose, c’est d’expliquer son contraire, permettez-moi de vous présenter 3 excès que nous vivons très régulièrement dans notre manière d’articuler la Vérité et nos actes.
1 : La vérité vécue pour elle-même.
- Voir le travers d'un certain type de chrétiens qui ont une manière tout particulièrement insupportable d'asséner la Vérité sur le coin de la figure.
- Ou, dans un contexte scout, ceux qui nous assène que « c’est comme ça », sans explication alors qu’on n’est pas dans un rapport d’autorité qui pourrait le justifier.
- On finit par aimer la Vérité pour elle-même comme si elle s’auto-suffisait.
- Souvent, on finit par en aimer d’abord la forme, l’amour de l’expression de la vérité, le cérémonial. On est devenu un « scout-fanfreluche » (avec ses petits flots, sa manche constellée d’insignes, …) qui y contemple le signe visible de sa supériorité morale sur « les autres scouts », qui eux n’ont pas les mêmes fanfreluches. Mais on oublie alors le « vrai » dont ces choses sont le signe et les actes auxquels elles nous engagent.
2 : Les actes vécus sans Vérité profonde
- C’est le bon manager qui se démène sans fond, sans vision.
- Le politicien qui en vient à réaliser de grandes choses, qui fait ça bien, mais dont personne ne sait quelle est sa direction. Il est une girouette à la proie des vents, et se retrouve à la moindre brise à remuer un pays entier pour n’importe quelle sottise.
- C’est la grand frustration d’énormément d’hommes politiques : il est de plus en plus difficile dans ce métier de parler du contenu, on est toujours dans la forme. Alors même qu’un politicien avec vision peut réaliser de grandes choses (voyons Robert Schuman, par exemple, qui inspira l’Europe).
- Voyez aussi le Chef de troupe qui se démène à « bien faire » mais sans réfléchir ou vivre intérieurement la Vérité, et qui s’essouffle en s’activant beaucoup, mais finit par tourner en rond. Quel est le sens de ce que nous faisons, le but et donc la direction ? Quand on a perdu sa boussole interne, on peut marcher aussi vite qu’on veut, on finira toujours par tourner en rond.
- Il y a un risque qu’à force de faire précéder les actes, la Vérité ne serve plus qu’à les justifier par après. Ne risque-t-elle pas alors elle aussi d’être la proie de la brise ?
- A la fin, on devient un scout-chansonnette. On a des petites « valeurs » bien sympa (genre « l’amour c’est bien », « ta liberté s’arrête… », le « vivre ensemble » et autre bisounours et arcs-en-ciel), mais ça ne vole pas bien haut ni ne descend profondément.
- C’est ce qui je crois est arrivé à beaucoup de troupes dans notre pays, et même parfois à l’intérieur de notre association.
3 : La Vérité « apparente »
- Nous pouvons vivre des choses bonnes, ou faire comme si, mais en apparence uniquement. Volontairement ou pas. (on peut croire sincèrement qu’on fait bien).
- Volontairement lorsque nous voulons camoufler notre vraie nature (c’est alors de l’hypocrisie).
- Involontairement lorsque on devient amoureux d’une manière d’être, d’un vivre-ensemble de la vérité fort confortable où l’on adopte une attitude (par exemple qu’on a reçue de son entourage) sans se l’être complètement appropriée.
- On devient quelqu’un de bien, on va aux SdE, on se retrouve à la paroisse du Sacré-Cœur, puis à Saint ABC à l’école, puis aux rallyes les samedis où il n’y a pas de scouts… et l’on s’enfonce confortablement dans un système social où l’on ne se remet pas en question.
- Il existe ainsi des routiers qui s’agenouillent devant le saint-Sacrement, font toute une série d’ablutions mais collectionnent les strings de leurs gonzesses dans leur chambre.
- Ou voyez encore ces époques passées on l’on chassait les filles-mères ou cachait leurs enfants… pour sauver les apparences vertueuses d’une famille.
- Nous sommes tous un peu conditionnés par notre environnement sur ce qui est raisonnable ou pas, mais il est nécessaire de se remettre en question constamment à ce sujet et d’enraciner toujours plus profondément la Vérité en nous.
- Autrement, le jour où la vraie raison de notre comportement disparaît, il y a un risque important que notre comportement vertueux disparaisse aussi.
Pour conclure :
- Sois vrai, que le Bien soit le vrai critère de tes actes, quoi qu’il en coûte
- Et fais ce que tu dis, que rien ne puise t’empêcher de réaliser ces actes. Vis-les, dans la vérité, et qu’elle soit réellement enracinée en toi.
- Nos actes sont le meilleur témoignage que nous pouvons rendre à la Vérité.
- Mais ne pas oublier de l'annoncer, et d'expliquer que c'est elle qui nous inspire (les histoires du « levain dans la pâte », c’est mignon, mais à force de ne pas annoncer la Vérité, on déchristianise l'Europe en deux générations).