Le tribunal de Tarbes vient de condamner un automobiliste pour homicide involontaire sur un fœtus de 30 semaines. Il avait fauché une femme enceinte le 20 janvier 2012.
Un fœtus de 30 semaines est-il un être humain ? Le tribunal de Tarbes vient de répondre oui, ce mardi 4 février, en condamnant un automobiliste pour homicide involontaire sur un bébé en gestation. Alors que la loi sur l’égalité hommes-femmes renforce l’accès à l’IVG en supprimant la notion de détresse et après le report de la loi sur la famille, ce jugement ne va pas manquer d’alimenter les débats sur un sujet de société sensible.
Le fœtus n'est pas considéré comme une personne
Il y a de fortes chances que le parquet général fasse appel du jugement qui va à l’encontre de la jurisprudence. En effet, le fœtus n’est pas, aujourd’hui, considéré comme une personne et ne bénéficie pas en conséquence d’un régime de protection pénale. On ne peut donc commettre d’homicide envers un fœtus ni aucune infraction. L’arrêt de la cour de cassation du 25 juin 2002 affirme clairement que «le principe de légalité des délits et des peines, qui impose une interprétation stricte de la loi pénale, s’oppose à ce que l’incrimination d’homicide involontaire s’applique au cas de l’enfant qui n’est pas né vivant».
Rappelons que l’avortement pour motif thérapeutique peut être pratiqué au-delà du délai des douze premières semaines et ce jusqu’au dernier moment de la gestation... Reconnaître un statut juridique au fœtus constituerait une remise en cause de l’avortement thérapeutique. «Dans ce jugement, il n’y a aucune prise de position religieuse ou philosophique mais une position humaine. Pour la maman, ce bébé était bien vivant. Si, pour une autre raison, elle avait dû accoucher prématurément, le bébé était viable. C’est le choc du fœtus contre la paroi utérine qui a provoqué son décès. Il s’agit d’un être humain qui a été tué», estime la présidente Élisabeth Gadoullet.
Il s'appelait Yanis
Yanis, voilà le prénom que les parents avaient choisi pour leur premier enfant.
La présidente du tribunal met en avant le traumatisme psychologique des parents et surtout de la maman. «Quand elle a repris connaisance à l’hôpital, elle a demandé : «Et mon bébé ?». Ce qui l’a le plus choquée, c’est qu’on lui réponde : vous d’abord, le bébé après… Tant qu’un bébé n’est pas né, on a parfois l’impression qu’il n’est pas vivant. Mais, s’il y a mort, il y a eu une vie… Comment peut-on dire qu’un bébé réagit à l’environnement qui l’entoure et n’est pas un enfant ? Pour la maman, il était vivant. Elle a été privée de ce premier enfant et en a ressenti de la culpabilité. Il est important qu’il y ait une reconnaissance de cet enfant notamment pour que les parents assument leur rôle de parents en deuil».
Me Fabienne Trusses-Naprous, conseil des parents, explique que la maman «ne sera jamais guérie de la perte de son enfant». Le jugement participe à l’atténuation de la douleur de la famille. «Le prévenu lui-même a reconnu avoir tué un enfant. La famille a besoin de cette condamnation», motive la présidente Gadoullet.
Jugements contraires
Plusieurs affaires ont relancé le débat sur le statut pénal du fœtus. Lors d’un accident de la route en 1995, une femme enceinte avait perdu son enfant. La cour d’appel de Metz avait alors rejeté, en 1998, l’homicide involontaire, ce dernier ne pouvant «être qualifié qu’à l’égard d’un enfant dont le cœur battait à la naissance et qui a respiré». Dans une autre affaire, un véhicule avait heurté une femme enceinte de 8 mois. Ici aussi, le fœtus était décédé des suites de ses blessures. La Cour d’appel de Reims avait retenu, en 2000, l’homicide involontaire contre le conducteur. Pour elle, le fœtus, âgé de 8 mois, était viable, et donc soumis à la protection pénale.
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