Le temps de l’écologie humaine est venu car il faut relever les nouveaux défis posés à l’humanité par ses extraordinaires mutations culturelles et technologiques. C’est notre identité humaine qui est en cause. Il faut aussi répondre aux crises contemporaines face auxquelles l’homme se sent soudain dépassé par sa propre technique : financiarisation de l’économie, gaspillage des ressources, mutation du monde agricole, urbanisation désordonnée, culture de l’impudeur, du mensonge ou de la transparence, etc. Nous sommes devant un choix historique : humanisation ou déshumanisation ? Il requiert beaucoup de discernement, de courage et d’engagement. Face au « court-termisme » qui anéantit le débat politique, l’écologie humaine est visionnaire. Elle assume l’urgence du très long terme.
Pourquoi ce courant est-il né en France ?
Aussi désolés que nous puissions être par les errances éthiques cautionnées par nos lois et nos mœurs, la France reste le pays par excellence de la personne. Elle ose en cela faire exception. Elle a su résister jusqu’à maintenant à la marchandisation du corps alors que la plupart des pays frontaliers s’y sont engouffrés derrière les anglo-saxons et leur pragmatisme matérialiste. En France, la personne n’a pas de prix. Le corps humain et ses « produits » sont incessibles. La forte répulsion inspirée par la gestation par autrui chez une grande partie des « élites » françaises de toutes sensibilités politiques est significative. Alors que cette même GPA est arrivée sans débat dans de nombreux pays… En France, on réfléchit à l’homme et au sens de ses progrès. Le marché ne dirige pas tout. Nous savons bien que nos « Droits de l’Homme » sont souvent détournés et dénaturés par une idéologie égalitariste, fondée sur le fantasme de l’autonomie. Mais ils révèlent aussi notre souci de la dignité humaine, notre soif d’universalisme et notre aptitude au rayonnement culturel. Ce sont trois valeurs spécifiques à la France, « éducatrice des peuples ». Certains moquent l’arrogance française ; elle est le revers d’une générosité créative, attestée au fil des siècles par de grands élans altruistes : hier missionnaires, humanitaires aujourd’hui. Si les Français sont difficiles à gouverner, c’est qu’ils savent résister quand le pouvoir abuse de sa puissance. Nous n’aimons pas la loi du plus fort. C’est d’ailleurs la raison du sursaut de résilience que vient de déclencher la laïcisation individualiste de notre société. Changer le monde — plutôt que de le conquérir — c’est inscrit dans nos « gènes ».
Qu’attendez-vous de ces premières assises ?
Elles sont conçues comme un moment déterminant pour favoriser le tournant culturel que tant d’entre nous désirent, pour la France, l’Europe et le monde. Nous le sentons : une grande et belle perspective s’est préparée depuis des dizaines d’années dans les profondeurs de l’âme de la France. Nous devons la réaliser. Nous avons choisi pour ces premières Assises un titre en rupture avec toute idée de désenchantement : « La révolution de la bienveillance — Changeons le monde par nos initiatives ». Les Assises nous offrent l’opportunité de faire rayonner la culture de l’altruisme. Elles vont mettre en relation, en synergie la générosité et la créativité de centaines de personnes « conscientisées », et déjà engagées au service de la société. L’écologie humaine attire déjà d’autres personnes de bonne volonté attachées aux valeurs de confiance, de fidélité et de protection des plus faibles qui sont tout simplement humaines. à nous d’instaurer une société qui veille au bien, fondée sur l’anthropologie du don. Nous sommes loin du spectacle affligeant qu’offrent le microcosme politique et ses principaux leaders. La parole des « grands » a moins de valeur que celle des « petits ». Mais ces derniers ne doivent plus ignorer qu’ils détiennent en eux la clé du changement.
Avez-vous les moyens d’une telle ambition ?
La dégringolade accélérée de notre pays est telle qu’une personnalité comme Jacques Attali prône en substance le « chacun pour soi ». Nous disons au contraire : réunissons-nous ! à nous de prendre les rênes ensemble. À nous de changer la société, par sa base, c’est-à-dire par ses forces vives… Puis de bas en haut. Nous en avons les moyens et la responsabilité, à condition d’agir en veillant les uns sur les autres.
Dans une société de la « déconstruction » en pleine perte — donc quête — de repères structurants, l’écologie humaine offre un recours. L’expression « écologie humaine » synthétise déjà l’aspiration de nombreux Français attachés à une anthropologie du réel. Humble, elle consent à ce qui est. Elle admet la vulnérabilité humaine. Elle est enracinée dans les familles, les associations et les territoires où se multiplient les initiatives au service du bien, du beau et du vrai.
Déjà elle déroute ou fascine la technostructure en place par sa capacité à être là où la puissance publique est en échec : par exemple dans les quartiers difficiles, auprès des personnes handicapées ou âgées, des gens de la rue, des prostitués, des migrants, etc.
Le réveil de la France n’arrive pas par hasard : depuis des dizaines d’années, des mouvements se développent au service de la personne, sans faire de bruit, à l’abri des projecteurs médiatiques et des récupérations partisanes. Ils ont mobilisé des centaines de milliers de personnes. Un extraordinaire tissu associatif et spirituel a fleuri. Aujourd’hui décomplexé, libre de toute inféodation politique, il est prêt à porter son fruit. Depuis le champ culturel jusqu’au champ politique.
Lu sur "Ecologie Humaine"